La performance énergétique des bâtiments, une nécessité à l’ère du développement durable
Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), les bâtiments sont responsables d’environ 40 % de la consommation annuelle d’énergie à travers le monde et du tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES).
La bonne nouvelle est que, par rapport aux autres secteurs émetteurs, les secteurs du bâtiment et de la construction sont ceux qui ont le plus grand potentiel de réductions significatives de leurs émissions par des actions à faibles coûts. Dans un contexte de réchauffement climatique, la performance énergétique de nos bâtiments n’est donc plus un luxe, mais une nécessité.
Préoccupations environnementales grandissantes
Bien qu’on ne comprenne pas encore parfaitement les conséquences du réchauffement climatique, les évidences scientifiques démontrent que c’est un facteur déterminant notamment dans les dérèglements météorologiques, l’élévation du niveau de la mer, la disparition de nombreuses espèces et la raréfaction des ressources.
En octobre 2019, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié un rapport sur les impacts d’un réchauffement de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Pour éviter de dépasser cette limite, et ainsi échapper aux pires scénarios de changement climatique, le GIEC insiste sur la nécessité de réduire de façon radicale les émissions de GES. « La limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C requiert des transitions “rapides et de grandes envergures” dans les domaines de l’aménagement du territoire, de l’énergie, de l’industrie, du bâtiment, du transport et de l’urbanisme. Les émissions mondiales nettes de dioxyde de carbone (CO2) d’origine anthropique devraient être réduites d’environ 45 % par rapport aux niveaux de 2010 d’ici à 2030, et il faudrait atteindre un “bilan nul” des émissions aux alentours de 2050 », indiquent les experts.
Au cours d’une conférence dans le cadre du Better Buildings Summit, qui s’est tenu le 5 juin 2018 à Toronto, le généticien et militant écologiste David Suzuki a longuement discouru sur l’impact des changements climatiques et l’urgence d’agir. « Quand nous oublions que nous sommes partie intégrante de la nature, nous oublions également que ce que nous faisons à notre environnement, nous le faisons à nous-mêmes », clame-t-il.
La responsabilité des bâtiments dans le réchauffement climatique
Avec la multiplication exponentielle des constructions neuves ainsi que les opportunités d’améliorations de l’efficacité énergétique du parc immobilier à travers le monde, si aucune action efficace n’est entreprise, les taux d’émission de GES continueront de s’accroître à une vitesse alarmante. « Entre 1971 et 2004, les émissions de dioxyde de carbone, notamment dues à l’utilisation de l’électricité dans les bâtiments, auraient augmenté de 2,5 % par année pour les bâtiments commerciaux et de 1,7 % par année pour les bâtiments résidentiels », relate le PNUE dans un rapport intitulé Buildings and Climate Change. Il faut dire que contrairement à certaines régions privilégiées comme le Québec avec son hydroélectricité, ce ne sont pas toutes les sources d’énergie qui sont renouvelables.
« Avec l’urbanisation croissante et rapide des pays les plus peuplés de la planète, bâtir de manière durable est plus que jamais nécessaire », met en garde le PNUE. Dans sa conférence, David Suzuki souligne justement l’importance, qui est aussi un défi, de créer des choses qui répondent aux besoins de la nature plutôt que d’essayer de forcer la nature à s’adapter aux constructions de l’humain comme nous le faisons en ce moment. « Nous devons changer radicalement notre façon de voir le monde, affirme-t-il. Cessons de considérer l’argent comme un but ultime et commençons à penser au futur de nos enfants et de nos petits-enfants. »
L’efficacité énergétique
Le milieu du bâtiment durable au Canada réfléchit depuis plusieurs années aux façons de limiter les incidences négatives des bâtiments sur l’environnement. En 2016, le Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCa) a publié Les bâtiments comme solutions au changement climatique. « Au fil des ans, plusieurs rapports nationaux et internationaux ont conclu que les améliorations à l’efficacité énergétique du secteur du bâtiment offrent l’approche la plus efficiente à la réduction de la consommation d’énergie et des émissions de carbone, comme aucun secteur de l’économie ne peut le faire », y écrit le président et chef de la direction Thomas Mueller.
L’efficacité énergétique est donc au cœur de plusieurs approches audacieuses favorisant l’innovation dans le secteur du bâtiment et de la construction. La certification Leadership in Energy and Environmental Design (LEED), par exemple, est reconnue comme une marque internationale d’excellence pour les bâtiments durables dans plus de 132 pays. Au Canada, elle contribue à redéfinir les bâtiments durables depuis 2002. « LEED a un énorme impact. Quand les architectes se sont lancés dans une compétition pour concevoir des bâtiments qui ne sont pas seulement LEED bronze, mais LEED platine, cela a stimulé le milieu de façon spectaculaire », fait remarquer David Suzuki, en ajoutant que l’objectif à atteindre aujourd’hui est le bâtiment à consommation énergétique nette zéro ou à énergie positive.
« Au cours de la dernière décennie, les programmes de certification des bâtiments durables ont relevé la barre à l’égard de l’efficacité énergétique, de l’énergie renouvelable et des pratiques de durabilité et ont ainsi changé la façon de concevoir, de construire, d’entretenir et d’exploiter les bâtiments », explique le CBDCa. Le Conseil a lancé en mai 2017 la norme sur les bâtiments à carbone zéro, en appui aux efforts du Canada de réduire ses émissions de GES d’ici 2030.
L’isolation comme alliée
L’un des défis les plus importants pour les bâtiments est sans doute celui de l’efficacité énergétique. Et celle-ci n’est optimale que si l’on mise sur une isolation de qualité et l’étanchéité des systèmes d’assemblage. Cette approche est essentielle pour réduire au minimum les besoins en chauffage et en climatisation, tout en assurant des conditions thermiques idéales à l’intérieur, c’est-à-dire chaudes en hiver et fraîches en été, donc un confort pour les usagers. À cela s’ajoute la réduction potentielle de la consommation d’énergie pendant la phase d’utilisation du bâtiment.
L’incontournable composante environnementale
Si la performance thermique du bâtiment figure parmi les priorités, autant pour les concepteurs que pour les propriétaires, la composante environnementale est désormais devenue incontournable dans tous les projets de construction. Dès la phase de conception, le concepteur peut déterminer les meilleures façons d’optimiser la performance énergétique d’un bâtiment.
« Nous devons repenser la façon dont nous concevons et construisons tous les bâtiments : de la plus petite structure à la plus grosse. Il faut les construire pour les prochains siècles et non plus pour une seule génération », dit David Suzuki, en nous lançant le défi de voir comment nos activités peuvent faire partie de la solution plutôt que de continuer à être une partie du problème.
Les professionnels de l’industrie qui cherchent des produits répondant aux exigences des bâtiments durables, telles que la certification LEED, peuvent notamment se fier aux déclarations transparentes, comme la déclaration environnementale de produit (DEP) et la Health Product Declaration (HPD).
Le développement durable, une opportunité d’affaires
Comme le dit si bien David Suzuki, contrairement à la croyance populaire, embrasser des valeurs de développement durable et de respect de l’environnement constitue une opportunité d’affaires et non pas un frein économique.
« Le bâtiment durable incarne une vision de l’avenir du Canada en fournissant des emplois, en accélérant la croissance du PIB et en fournissant une solution applicable pour contribuer à l’atteinte de nos objectifs de réduction de GES », confirme le CBDCa.
Autre point peut-être tout aussi important, le bâtiment et les infrastructures durables créent des villes résilientes qui résisteront à l’épreuve du temps ainsi qu’aux impacts des changements climatiques et à la volatilité économique qui l’accompagne. Il ne fait aucun doute que les bâtiments durables, sur leur cycle de vie, permettent de réaliser des économies tout en diminuant l’empreinte environnementale.